Fabuloir ?

Se lire soi-même comme une fiction autant que comme un fait est le seul moyen de garder la narration ouverte – le seul moyen d’empêcher le récit de prendre la tangente sous l’effet de son propre rythme, souvent vers une conclusion dont personne ne veut.

Jeanette Winterson, Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?

Fabuler, c’est élaborer une œuvre sous forme de fable, de récit d’imagination. C’est aussi présenter comme réels des faits imaginés.

Affabuler, c’est organiser en épisodes suivis le sujet d’une œuvre d’imagination – on affabule une intrigue. C’est aussi arranger la réalité à sa manière.

Confabuler, c’est s’entretenir familièrement avec quelqu’un – ce que nous faisons au Petit Fabuloir. D’ailleurs, ces verbes viennent du latin fabulari : parler, causer, bavarder ; inventer une histoire, une fable.

Une fable, c’est un récit imaginaire, ou mensonger, mais c’est aussi la matière d’une histoire, les faits et événements qui la constituent. En latin classique, fabula signifie tout simplement propos, parole.

D’imaginaire à faux, il n’y a qu’un pas, que l’usage de ces mots fait mais que le Petit Fabuloir ne pose pas : tout récit, même de faits réels, est une construction, qui résulte de sélections – choix d’épisodes, mais aussi de mots pour les dire -, de mises en ordre et d’interprétations pour leur donner sens et les relier.

Sans compter que je refuse de céder à la tyrannie de la réalité – titre d’un essai passionnant de Mona Chollet : comme tout récit, ce que nous appelons réalité est une construction. Elle mêle réel – des faits, des événements … – imaginaire et symbolique – les points de vue, visions du monde et croyances à partir desquels nous l’envisageons, les mots que nous choisissons pour en parler, les sens que nous donnons aux choses et les liens que nous tissons entre elles.

Quant à fabuloir … c’est un mot que j’ai inventé. C’est un lieu, réel – chez moi – et imaginaire – dans mon esprit et dans le vôtre. Un lieu où mot à mot, parole à parole, vous vous faites l’auteur(e) de votre vie : pas celle ou celui qui joue un scénario écrit par quelqu’un d’autre, mais celle ou celui qui l’écrit, et qui sait que, l’écrivant, l’inventant, on le fait advenir.

Et un lieu où vous regardez la réalité du seul point de vue qui la révèle, qui lui donne sens et consistance, nuance et saveur : depuis le Promontoire du Songe, selon le beau terme de Victor Hugo.

Habiter ce lieu comme je l’ai fait ces dernières années a changé ma vie. Je l’ai investi par des pratiques quotidiennes ou hebdomadaires, des petites fabulations des heures et des jours qui en gardent trace et les poétisent : tenir des carnets, retranscrire des citations inspirantes sur des papiers colorés, à coller dans ces cahiers ; écrire des poèmes, à offrir à des êtres chers dans des petits carnets que je fabrique, des boîtes d’allumettes que je décore – ce que j’appelle mes Brimborions poétiques et que vous voyez sur cette page -, à mettre dans mes carnets, à partager avec vous sur les réseaux sociaux. Toutes choses que je vous invite à faire dans mes accompagnements, sous une forme qui sera vôtre.